Thaïlande : la ville de Bangkok n'est "plus sous contrôle"

Publié le par Carland

thaïlande 19 05Bangkok a pris feu, mercredi 19 mai. Les manifestants antigouvernementaux, les "chemises rouges", ont incendié de nombreux bâtiments, dont des centres commerciaux, les locaux d'une chaîne de télévision et la Bourse de Bangkok, en réponse à l'opération de l'armée thaïlandaise pour les déloger du quartier qu'ils occupaient.

Le gouvernement thaïlandais a alors indiqué que la ville de Bangkok n'était "plus entièrement sous contrôle", annonçant que l'armée allait "s'occuper de ceux qui provoquent des troubles". La police a d'ailleurs été autorisée à tirer à vue sur des pillards ou des émeutiers.

"Le gouvernement appelle quiconque menant des attaques à cesser ces actions car leurs leaders se sont déjà rendus et ont convenu d'entamer la réconciliation nationale", a déclaré unporte-parole du gouvernement, Panitan Wattanayagorm.

 Au moins cinq morts

Lancée dans la matinée, l'opération visant à évacuer le quartier de la capitale occupé par les "rouges", a pris fin quelques heures plus tard. Après cet assaut qui a fait au moins cinq morts, les leaders des "chemises rouges" se sont rendus à la police et ont appelé leurs partisans à cesser le mouvement.

Selon un porte-parole du gouvernement, Panitan Wattanayagorn, l'opération de l'armée a permis de reprendre le contrôle de quartiers clés, comme l'intersection de Rajaprasong et le district de Lumpini que les "chemises rouges" occupaient depuis six semaines.

Au moins quatre manifestants ont été tués durant l'opération ainsi qu'un photographe italien, selon la police. "A l'issue de l'opération, le gouvernement a repris le contrôle de Rajaprasong et Lumpini mais il y a plusieurs zones où les opérations doivent se poursuivre", a-t-il indiqué.Un couvre-feu, le premier depuis 15 ans à Bangkok, devait entrer en vigueur à 20h locales (15h heure française) jusqu'à jeudi matin 6h.

 Une centaine de personnes prises au piège d'un incendie

Mercredi soir, une vingtaine de bâtiments avaient été incendiée par les "chemises rouges", dont plusieurs centres commerciaux, la Bourse de Bangkok, et les locaux d'une chaîne de télévision, Channel 3, où une centaine de personnes seraient prises au piège, a annoncé un responsable des pompiers.

"Le bâtiment [de la chaîne de télévision Channel 3] a été attaqué par des manifestants et quand nous avons envoyé un véhicule, il a également été attaqué. A l'heure actuelle, ils se sont repliés, nous avons donc de nouveau envoyé un camion", a indiqué à l'AFP un porte-parole des pompiers de Bangkok. "Nous sommes dans une situation de crise. Une centaine de nos employés sont pris au piège à l'intérieur", a indiqué Samran Chatto, journaliste à Channel 3.

Un hélicoptère a été envoyé pour commencer une évacuation des personnes prises au piège, ont également indiqué à l'AFP des responsables militaires.

Les pompiers signalent également "plusieurs incendies, y compris dans le Central World", l'un des plus grands centres commerciaux de la capitale, qui était fermé depuis plusieurs semaines. "Une agence bancaire ainsi que les locaux d'une société d'électricité ont également été incendiés", a ajouté la même source. Une épaisse fumée noire, provenant de nombreux pneus incendiés, se dégageait au-dessus de la ville de Bangkok, a constaté un journaliste de l'AFP.

L'armée a annoncé mercredi qu'elle mettait fin à l'opération lancée pour évacuer le quartier de Bangkok occupé par les "chemises rouges", où le couvre-feu sera imposé de 20h mercredi soir (15h heure française) à 6h jeudi matin tandis que des violences se poursuivaient.

Des soldats ont pénétré en début de matinée dans le vaste camp, érigé dans un quartier touristique et commercial huppé de la capitale, après avoir ouvert une brèche dans une barricade de pneus, de bambous et de barbelés.

 "Nous ne voulons pas plus de morts"

Des combats ont aussi eu lieu pendant une partie de la matinée dans le grand parc Lumpini, un lieu de promenade des Thaïlandais et des touristes étrangers, dont l'armée a voulu reprendre le contrôle. Les leaders des manifestants ont annoncé peu après 13h (8h heure française) qu'ils allaient se rendre aux autorités et se disperser.

"Nous arrêtons nos manifestations maintenant", a déclaré Nattawut Saikuar, l'un des principaux chefs des protestataires, en s'adressant aux plusieurs milliers de "rouges" rassemblés devant la principale estrade, au coeur de la zone qu'ils occupaient depuis début avril. "Je sais que c'est inacceptable pour certains d'entre vous et que certains ne veulent pas entendre ceci mais nous ne pouvons résister", a-t-il ajouté.

"Moi et mes compagnons allons nous rendre au Bureau de la police nationale. Je sais que vous souffrez. Certains d'entre vous sont sans voix. Mais nous ne voulons pas plus de morts", a déclaré, très ému, Jatuporn Prompan."Nous allons échanger notre liberté contre votre sécurité. Nous avons fait tout ce que nous pouvions", a-t-il conclu. "Je demande à tout le monde de rentrer chez soi".

Peu après cette annonce, les manifestants ont commencé à quitter les lieux, tandis que des violences se poursuivaient dans les alentours de la zone, a constaté un journaliste de l'AFP. Nattawut et au moins trois autres cadres rouges se sont alors dirigés au Bureau de la Police nationale où ils se sont constitués prisonniers.

 "Autorisée à tirer immédiatement"

La police de Bangkok a "déployé 1.000 membres de la force d'intervention rapide et si (les manifestants) sont vus en train de piller, allumer des incendies ou provoquer des émeutes, la police est autorisée à tirer immédiatement", a indiqué le général Piya Uthayo, son porte-parole.

L'émotion était très vive au milieu du camp retranché.

Devant l'estrade, plusieurs milliers de "rouges", dont de nombreuses femmes, avaient écouté les discours dans le calme mais ne cachaient pas leur inquiétude. Quelques unes pleuraient. Certaines portaient un masque, pour se protéger d'éventuels gaz lacrymogènes.

Peu après les discours finaux, la scène a été désertée et les manifestants ont commencé à marcher vers les issues du camp retranché.

 Une brèche dans une barricade

Mercredi matin, de nombreux échanges de tirs étaient entendus dans le camp retranché des manifestants gouvernementaux, tandis que des incendies, notamment de pneus, envoyaient de gros nuages de fumée noire dans le ciel.

Les blindés et des soldats ont pénétré en milieu de matinée dans le vaste camp, après avoir ouvert une brèche dans une barricade de pneus, de bambous et de barbelés, selon des journalistes de l'AFP.

Des centaines d'autres militaires avaient pris position dans le centre de la capitale, qui ressemblait à une zone de guerre avec des rues désertes et des magasins fermés.

 Appels au calme

Dans le camp retranché, les leaders rouges ont averti que le "jour du jugement" était arrivé. "Nous n'allons pas partir. Nous allons rester et prier", a lancé Kwanchai Praipana, un autre chef. Un leader des manifestants antigouvernementaux a appelé au "calme" les milliers de "chemises rouges". "Restez calmes. Quoiqu'il arrive aujourd'hui, nous resterons ensemble", a déclaré Nattawut Saikuar sur l'estrade principale, situé au milieu de la zone rouge.

"Le gouvernement utilise l'armée pour nous réprimer, mais nous allons rester non-violents. Nous sommes toujours prêts à des négociations", a-t-il ajouté. Devant l'estrade, les milliers de "rouges" présents, dont de nombreuses femmes, écoutaient dans le calme, mais ne cachaient pas leur inquiétude. Des femmes pleuraient. Certaines portaient un masque, pour se protéger d'éventuels gaz lacrymogènes. Une banderole "Arrêtez de tuer le peuple" a été accrochée à proximité de la scène. Nattawut a appelé ceux "qui craignaient pour leur vie" à se rendre dans une pagode, située dans le quartier, qui a été déclarée "zone protégée". Plusieurs centaines de femmes et d'enfants y avaient trouvé refuge ces derniers jours.

 "Les opérations vont se poursuivre"

Le porte-parole du gouvernement Panitan Wattanayagorn, a annoncé lors d'une allocution télévisée en thaïlandais et en anglais que "les opérations vont se poursuivre tout au long de la journée".

Elles "sont destinées à faire en sorte que les forces de l'ordre soient en mesure de garantir la sécurité de la population" autour du quartier commercial et touristique occupé par les "rouges" depuis le 3 avril pour obtenir la démission du Premier ministre, Abhisit Vejjajiva.

Les soldats interviennent pour "fermer tous les accès et assurer le contrôle à 100% de la zone", a déclaré de son côté à l'AFP Prawit Wongsuwon, ministre de la Défense, précisant que les autorités essayaient "d'éviter les pertes humaines".

 "L'armée doit être du côté du peuple"

Dans le camp, des chanteurs ont entonné des chants de lutte pour renforcer le moral des manifestants, dont le nombre est estimé à 5.000, dont de nombreuses femmes. Le pouvoir a également évalué à plus de 2.000 le nombre de manifestants actifs à l'extérieur du camp.

"L'armée doit être du côté du peuple, elle n'appartient pas à Abhisit, sinon l'armée sera pour toujours l'ennemie du peuple", a proclamé un autre leader, Nisit Sinthuprai.

Un manifestant posté à une barricade, Thanarat Oad-rem, s'est dit "prêt à mourir ici". "J'attends la justice depuis si longtemps", a ajouté cet homme de 45 ans, originaire du nord-est du pays, bastion du mouvement qui manifeste depuis la mi-mars.

Le pouvoir a mis fin dans la nuit aux perspectives d'une reprise des négociations, malgré l'accord des "rouges" pour une médiation de parlementaires.

 "Les négociations sont terminées"

Le pouvoir avait mis fin dans la nuit aux perspectives d'une reprise des négociations, malgré l'accord des "rouges" pour une médiation de parlementaires.

"Les négociations sont terminées maintenant", a affirmé le général Lertrat Rattanavanich, membre de l'équipe des quelque 60 sénateurs impliqués dans cette ultime tentative. Il a évoqué des "pertes insupportables" en cas d'opération de dispersion totale du mouvement.

Les dernières négociations officielles ont été rompues depuis une semaine, lorsqu'Abhisit a annulé sa proposition d'organiser des élections anticipées à la mi-novembre, exaspéré par les exigences sans cesse plus élevées des "rouges".

Des affrontements violents avaient déjà fait 39 morts et 300 blessés entre jeudi soir et lundi. Depuis le début de la crise à la mi-mars, 68 personnes ont été tuées et environ 1.700 blessées.

 (Nouvelobs.com avec AFP)

Source : http://tempsreel.nouvelobs.com/actualite/monde/20100519.OBS4151/a-bangkok-les-chemises-rouges-incendient-de-nombreux-batiments.html

Publié dans Guerre

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